Les Mondes de P-Val: Pourquoi ne pas leur demander "pourquoi ?"

mercredi 20 octobre 2010

Pourquoi ne pas leur demander "pourquoi ?"

Quand un interlocuteur vous livre une attente et que vous souhaitez mieux la comprendre, quelle question lui posez-vous en priorité ?


Je pose cette question à un ami agent immobilier.
Première réponse de sa part, les agents immobiliers ne posent pas assez de questions pour comprendre le besoin de leurs interlocuteurs. Mais certains s'intéressent vraiment au besoin de leur prospect et engage plusieurs questions : « Quelle genre de maison ? Pour quand ?  Dans quelle zone géographique ? Pour quel budget ? » … finalement, ils reconstituent un cahier des charges.

Plus généralement, nos études montrent que, spontanément dans nos relations, dans ce type de situation, si nous nous intéressons au besoin de notre interlocuteur, nous reconstituons un cahier des charges ...

... Mais la  question « pourquoi ces attentes» vient très rarement en priorité et parfois ne vient jamais.

Pourtant la réponse à cette questions pourrait nous faire découvrir des leviers de conviction et d’adhésion de notre interlocuteur, d’un nouveau genre.
Et vous, managers, développeurs business, recruteurs, dirigeants ou collaborateurs en début de carrière vous retrouvez aujourd’hui, plus qu’hier, confrontés à l’exigence d’être convaincant.

  • Dans vos actions de recrutement, vous faites peut-être face à cette nouvelle génération de candidats dite « génération – Y », qui vous demandent effrontément « ... mais vous, que m’apportez-vous en terme de salaire (évidement !), en terme d’équilibre vie privé / vie professionnelle, en terme d’évolution de carrière, en terme de formation ?» …. Et la liste est longue.
  • Dans vos relations commerciales, vous souhaiteriez peut-être que les prospects et clients se bousculent plus pour bénéficier de vos produits et/ou services :-)
  • Et quand vous devez mobiliser vos équipes sur un nouveau projet ou changement majeur interne, vous avez dû noter que communiquer vers eux unilatéralement menait sinon à l’échec, à une perte de motivation.
  • Et enfin, dans les constructions de partenariats, avec le sacro-saint déjeuner « pour envisager des axes de partenariat», nous comptabilisons souvent qu’un trop grand nombre de ces recherches d’opportunités finit malheureusement aux oubliettes.
Oui ! Convaincre, convaincre en permanence matin, midi et soir (et je ne parle pas de votre vie privée !), tel est votre métier, finalement !


Vous diriez peut-être que « il suffit que je sois convaincu moi-même et je serai convainquant. Convaincre sans être convaincu, c'est ça le vrai problème »
Vous diriez peut-être aussi « il suffit de connaître les besoins de mon interlocuteur et je vais communiquer ma proposition, mon idée sous l’angle qui couvre au mieux ses besoins » … Oui, cela est necessaire mais parfois insuffisant, notamment quand vous vous apercevez que vous savez mal couvrir les besoins de votre interlocuteur.


Face à l’attente que vient de vous exprimer votre interlocuteur, vous avez alors peut-être intérêt à découvrir les raisons plus profondes qui motivent ses attentes mais ce n’est pas simple : Qui êtes-vous pour oser poser ces questions ? Cela pose des problèmes de leadership, de légitimité, voire d’autorité personnelle pour poser des questions parfois intrusives.
Vous pourriez craindre également d’afficher une forme d’incompétence sur la question ?
Alors peut-être vous demanderiez-vous … « COMMENT faire pour parvenir à poser des questions intrusives ?» (Et d’ailleurs, une question en passant : vous demanderiez « COMMENT faire ? » ou bien vous demanderiez « POURQUOI faire ? » …. ! Au fond)


Comme je l’évoquais en début de cette note, un test effectué sur quelques centaines d’acteurs dans le domaine de la vente montre que la question « pourquoi » ne vient quasiment jamais.
Cela peut s’expliquer en partie. Nous avons passé le plus clair de notre temps d’études et souvent également le plus clair de notre temps en entreprise à chercher des solutions à des problèmes. Nous avons été évalués et reconnus sur notre capacité à trouver « COMMENT » résoudre le problème et non pas « POURQUOI » le résoudre. La boucle de reconnaissance dans le Monde éducatif est bien souvent la même : tu es bon si tu sais résoudre le problème !
Et cela se retrouve naturellement dans nos interactions au quotidien, comme un reflexe, une routine.
Vous, dans votre entreprise, dans vos relations commerciales, partenariales, de management interne, en recrutement, à quel point demandez vous à vos interlocuteurs « pourquoi telle attente » ?, avant de chercher une solution pour couvrir cette attente ?
Dans quel Monde êtes-vous ? un Monde de chercheurs de solutions devant un problème affiché ou un Monde où vous cherchez la douleur profonde de votre interlocuteur pour trouver l’idée qui l’aidera au mieux dans son activité, peut-être moins « chère » à mettre en œuvre et plus efficace.


Rapprocher votre Monde du Monde de vos interlocuteurs, c’est aussi approfondir la connaissance de votre interlocuteur, ses moteurs et freins profonds, son Monde ….


Dans le cadre de la performance commerciale, la méthode et les comportements « Vente Complexe » vous aident à vous rapprocher de vos clients, justement en montant au niveau des douleurs de vos interlocuteurs.
Chercher les motivations profondes de nos interlocuteurs apporte également un bénéfice net dans pour le développement de nos relations personnelles, en dehors d’enjeu de « Vente » à proprement parler.


Mais ce n’est finalement pas simple … il faut changer de Monde …

Alain Nifle

2 commentaires:

  1. Poser la question « pourquoi ? », c'est poser la question du « sens ». Or dans le monde de l'entreprise, la question du sens est intimement liée aux processus de réflexion et de décision d'une action à mener. Quel est le sens de votre action ? Pourquoi ?

    Demander pourquoi, c'est donc une (re)mise en question d'un processus de réflexion et de décision de manière spontanée, sans y avoir été invité. C'est donc se placer à un niveau de questionnement particulier et qui peut parfois être considéré comme « déplacé ». On comprend donc aisément que certains hésitent à s'aventurer dans cette direction, et préfèrent se concentrer sur le « comment », au risque de ne pas se démarquer.

    « Déplacé »... C'est drôle car c'est justement l'attitude que vous préconisez. Se « déplacer » pour se « rapprocher » du monde de nos interlocuteurs... Faut-il avoir une certaine attitude « déplacée » pour pouvoir opérer ce rapprochement ? Certes, c'est jouer avec les mots...

    J'ajouterai juste que la question « pourquoi ? » pour être efficace ne saurait l'être sans une réflexion en amont. Pour qu'un pourquoi génère un rapprochement, il faut nécessairement que celui qui pose la question ait une idée assez précise des réponses possibles AVANT de poser la question. Constat paradoxal qui montre que bien poser la question « pourquoi ? » suppose d'avoir déjà des réponses...

    Pour reprendre votre exemple: au constat « je cherche une maison à louer », la réponse « Pourquoi? » pourrait être perçue comme une remise en question de l'action. Et il n'est pas rare de s'entendre répondre: « Tu penses que ce n'est pas une bonne idée ? ». Raccourci qui peut s'avérer infondé mais attitude classique. A ce stade de la conversation, pour rester pretinent, mieux vaut avoir quelque chose à répondre... La question du pourquoi plaçant l'interlocuteur dans une démarche de justification de son action, ou de contre-question, il faut être préparé.

    Dis moi pourquoi, je te dirai comment... Non...Dis moi plutôt qui tu es, je te dirai pourquoi et je te vendrai comment.

    Monde formidable...

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  2. Merci pour ce commentaire qui pousse la reflexion.

    Effectivement, cela fait emerger immédiatement la question du sens.
    D’ailleurs la question « pourquoi ?» possède deux interprétations :
    - Pourquoi ? dans le sens "qu’est-ce qui a généré cette attente ?" sous l’angle d’une douleur primaire.
    - Pour Quoi ? dans le sens, « pour quoi faire ?», une question sur une projection plus profonde sur l’avenir souhaité.

    Dans les deux cas, oui, c’est se mettre sur un terrain potentiellement « déplacé ». C’est donc prendre un risque et c’est aussi se donner une opportunité : risque d’être perçu comme trop intrusif, opportunité de découvrir l’autre mieux pour pouvoir l’aider le cas échéant.

    Pour aller plus loin, si nous le regardons sous l’angle des Mondes, nous pourrions dire que la capacité de demander « pourquoi » , la capacité d’aller plus loin que l’attente, ou même la capacité de devancer l’attente, est emblématique d’un nouveau Monde à incarner en équipe.
    Emblématique d’un Monde où vous générez des interrogations inédites, où vous vous placez sur des terrains différenciés et différenciants, un Monde dans lequel vous pouvez générer une disruption, un Monde dans lequel on ne cherche pas uniquement à couvrir les attentes affichées mais où l’on cherche à apporter des idées qui aide l’interlocuteur, le client, le partenaire à s’approcher de son but plus profond, parfois plus directement.

    Beaucoup d’entreprises mènent actuellement des des transformations de fond pour être en mesure de se rapprocher de leurs clients en travaillant sur cette question. L’experience PVAL montre que cela demande un véritable changement de Monde.

    Aller, je pose aussi une autre question.

    Lorsque que nous accompagnons des entreprises sur cet enjeu, une facette importante et problématique survient rapidement : aller sur le thème de la douleur primitive pose des questions de leadership relationnel et d’autorité sur le sujet. Encore une fois, « qui êtes vous pour oser me poser cette question ? »

    Alors voici la question : Faut-il du leadership relationnel pour faire accepter la question « pourquoi ?» à son interlocuteur, ou bien justement, le simple fait d’oser poser la question « pourquoi » renforce immédiatement votre leadership relationnel ?
    Peut-être que cet œuf et cette poule mériteraient d'être étudiés ...

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